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 [Drame] Sous le lit

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AuteurMessage
Felicia Cotroni
Déplaceur de vent
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Felicia Cotroni


Nombre de messages : 191
Localisation : Trois-Rivières, Québec
Date d'inscription : 09/08/2008

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MessageSujet: [Drame] Sous le lit   [Drame] Sous le lit EmptyLun 29 Sep - 13:19

Sous le lit
Août 2005
Dans le cadre d'un concours de Voir, il me semble bien. Chuck serait davantage en mesure de le rappeler.

Il était dix-sept heures et je rentrais de travailler. La maison silencieuse et mal éclairée m’attendait de nouveau. Simon devait être resté encore une fois au lit toute la journée. Qu’allais-je faire de lui? Sa dépression commençait à me pomper l’existence et je me rendais compte que ma patience avait ses limites. Je montai rapidement les marches de l’escalier pour avertir mon ami de ma venue, mais la cadence de mes pas ralentit quelque peu lorsque je m’aperçus que quelque chose n’allait pas. Sur la porte faisant face à l’escalier se trouvait une tâche rougeâtre : du sang.

Immobile sur le palier, un frisson me parcourut toute entière et mon cœur se mit à battre à une vitesse folle. Sans crier gare, je me ruai vers la porte tâchée, la poussai et m’introduisis dans la pièce. Mes yeux trouvèrent rapidement ce qu’ils redoutaient : un homme inconscient, étendu de tout son corps sur un plancher froid. Je le fixai, le souffle coupé. L’incompréhension totale s’empara de moi. Je regardai le sang sur le sol, puis les entailles aux poignets de Simon. Je ne pouvais pas croire qu’il avait fait cela. Il m’avait quittée, moi, son amie et sa confidente. Je n’avais pas pu le retenir et j’avais cru que sa peine était passagère. Quelle sotte avais-je été!

Lentement, comme magnétisée par ce spectacle morbide, je m’agenouillai aux côtés de Simon. D’une main tremblante, je caressai les cheveux de mon ami. La douleur était trop intense et les regrets trop présents. Sans que je m’en sois aperçue, des larmes chaudes coulaient maintenant sur mes joues, doucement et sans fin. Je commençai à respirer bruyamment et à émettre des sons inintelligibles pour finalement crier ardemment ma rage. J’étais aveuglée par ce paysage sans vie et mon cœur se consumait de toute sa souffrance. Sans réfléchir, je me dirigeai hors de la pièce et criai pour pleurer Simon. Mes sanglots n’étaient plus des sanglots, mais des cris de douleur qui prenaient vie dans des ténèbres surhumaines et détestables. C’en était trop. Je n’avais qu’une idée en tête : me réveiller. Cela ne pouvait être réel. C’était impossible.

Paniquée et apeurée, j’appelai Anthony. Il me répondit après quelques sonneries. Il semblait attendre mon appel. Je tentai de lui expliquer la situation dans laquelle je me trouvais, mais mes mots s’entremêlèrent et un discours incompréhensible en ressortit. Je partis à pleurer de plus belle. Je nageais en plein cauchemar. À ma deuxième tentative, je réussis à faire comprendre à Anthony que l’heure était grave et qu’il devait absolument me retrouver chez moi. Il acquiesça et raccrocha. Le fait de savoir qu’il arriverait bientôt me soulagea. Il était sans doute déjà en route. Je n’avais qu’à attendre maintenant.

Près de vingt minutes plus tard, Anthony arriva. Il entra sans cogner comme il avait l’habitude de faire. Simon et lui étaient amis depuis un moment déjà et la maison était en quelque sorte devenue leur demeure à tous les trois. J’étais assise au bas de l’escalier, le regard perdu dans le vide et les larmes sèches sur les joues. Il s’approcha de moi, s’agenouilla face à moi et vint pour me prendre les mains lorsqu’il se rendit compte que l’une d’entre elle était tachée de sang. Il me souleva le menton du bout des doigts, ce qui me força à le regarder. Quand mon regard pénétra dans le sien, mes yeux s’embrouillèrent de nouveau de larmes.

- Simon s’est suicidé, lui dis-je d’une voix presque inaudible.
Anthony me regarda sans broncher. Il ne semblait pas surpris, ni même troublé par ce que je venais de lui annoncer. Je le comprenais. Il n’y croyait simplement pas. Je ne lui en voulais guère. Je ne l’aurais pas plus cru s’il m’avait annoncé une telle nouvelle. Or, il devait voir la scène de ses propres yeux. Je me devais de lui montrer la vérité.

- Il est en haut, ajoutai-je solennellement en fixant Anthony dans les yeux. Il s’est tranché les veines. Il est mort. Simon est mort.

Je me levai, lui fis signe de me suivre et montai les escaliers tranquillement. Mes mouvements semblaient ralentis, hypnotisés. Je n’avais plus l’impression d’avoir quelconque contrôle sur ce qui se passait. Émotions et gestes : tout était robotisé. Anthony me suivit sans dire un seul mot. Rendus à l’étage supérieur, je le regardai une dernière fois avant d’entrer dans la pièce où gisait mon ami Simon.

Le choc fut apparemment terrible. Anthony s’affaissa sur le sol, le regard vague et la bouche pendante. À la vue du corps inerte de mon ami et de ce sang sur le sol, mon cœur se chargea de nouveau de tristesse, de regrets et de colère. Je reculai hors de la pièce pour éviter de revivre ces émotions négatives. Je jetai un bref coup d’œil à Anthony avant de sortir et je le vis porter ses mains à sa figure. Je ne voyais pas ses yeux, mais j’imaginai la catastrophe qu’il venait de découvrir s’y réfléchir. Anthony et Simon étaient si près l’un de l’autre. Peut-être ressentait-il la même culpabilité que moi à propos de l’ignorance dont nous avions usé envers la souffrance de notre ami. C’était peu dire : nous avions été totalement ignorants.

Je tournai le dos à la porte, levai la tête et regardai autour de moi. Je fixai la chambre de Simon et m’y dirigeai lentement. Avait-il laissé un message avant de se donner la mort? À la porte de la chambre de mon ami, j’hésitai avant d’entrer. Un sentiment étrange m’empêchait de continuer et de chercher une quelconque lettre de la part de Simon. Peut-être avais-je simplement peur de trouver les raisons de son départ ou encore me sentais-je mal à l’aise de brimer son intimité. Il avait beau être décédé, je n’en étais pas encore rendue à ce stade.

Je rentrai néanmoins dans la chambre. Je parcourrai du regard la pièce; rien de bien utile n’était visible à mes yeux. Je m’avançai vers le lit, y aperçus des tâches de sang sur les draps et me rappelai celle qui gisait sur la porte de la salle de bain. Simon avait dû se couper les veines dans la chambre et se rendre dans la pièce voisine par la suite. J’observai le sol et y vis quelques autres tâches de sang. En contournant le lit, je fronçai un sourcil en m’apercevant qu’il n’y avait ni lame, ni autre objet tranchant qui aurait pu être utilisé pour se taillader. Je criai à Anthony de me rejoindre et lui expliquai la situation. Il parut agacé.

- Annabelle, commença-t-il. Je ne crois pas que ce soit le moment de trouver avec quoi Simon s’est suicidé. Sans doute que la lame ou peu importe ce qu’il a utilisé s’est glissé sous le lit.

J’acquiesçai de la tête et suivis Anthony hors de la chambre. Nous descendîmes les escaliers et nous dirigeâmes vers la cuisine. Comme des automates, nous nous assîmes à la table. J’attendis. Je me sentais envahie d’un vide obscur et prenant. Il était temps d’agir maintenant.

- Nous devrions appeler la police, dis-je.
- Sans doute as-tu raison, répondit Anthony en se levant.

Je me levai à mon tour. Je regardai mon ami, le cœur malheureux et les larmes aux yeux. Il s’approcha de moi, me prit la main et me serra fortement contre lui. Je m’y sentis aussitôt en sécurité et quelque peu réconfortée. Je me laissai envelopper de son étreinte et oubliai pour un instant que le cadavre de Simon gisait au deuxième étage. Bien qu’énormément tourmentée, je me sentais pour le moment seulement apaisée.

- Je suis désolé, Annabelle, dit soudainement mon ami. Je ne peux pas te laisser faire ça.
- Quoi? demandai-je en tentant de me défaire du câlin de Anthony.

Il me tenait toujours par la taille. Je le dévisageai étrangement, ne comprenant pas les derniers mots qu’il venait de prononcer. Son silence en était tout autant troublant. Quand je voulus redemander ce qu’il voulait dire, je sentis une douleur intense naître dans mon dos. Le souffle coupé, je regardai Anthony disparaître au-dessus de moi lorsque je m’effondrai sur le sol. Il tenait un couteau dans sa main et me fixait. Que se passait-il? Tout cela était impossible! J’essayai de prononcer une phrase, mais rien ne sortit de ma bouche. La gorge serrée, je laissai quelques sanglots se bousculer hors de celle-ci, puis je reçus un deuxième coup de couteau à la poitrine. La douleur était trop vive, l’incompréhension trop intense et la trahison trop sauvage. Je me sentis soudainement étourdie et mes yeux se brouillèrent au même moment.

- Je ne pouvais pas te laisser appeler la police, Annabelle, continue Anthony dans sa folie. Ils auraient su que Simon ne s’était pas suicidé. Ils auraient deviné. Je dois éliminer les preuves et je les appellerai ensuite. Ne t’inquiète pas, ma douce amie. Ils viendront. Ils viendront…

Ce fut les derniers mots que j’entendis. Ensuite, plus rien.
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